Des toitures solaires pour une totale autonomie

Le 25/02/2025 à 14:39 par La rédaction

L’intégration de solutions photovoltaïques sur les toitures de bâtiments de stockage nécessite de relever quelques défis de taille. Les structures, qu’elles soient neuves ou existantes, doivent notamment être en mesure de les accueillir sans risque. Nous avons échangé avec Denis Oudin, ancien directeur France chez LURA France et désormais consultant spécialisé via l’entité D.O.C. Consulting.

Après 25 ans d’expérience à la tête de son entreprise spécialisée dans le stockage vrac, Denis Oudin est désormais consultant, via sa structure D.O.C. Consulting, spécialisée dans les bâtiments de stockage industriels ou portuaires. « Je propose aujourd’hui mon expertise à différentes sociétés dans les secteurs du recyclage et de la gestion du vrac, explique-t-il. Je leur transmets mon savoir-faire et je les forme aux techniques de stockage du vrac, ce qui est précieux pour le développement de leur activité. Cela fait plus de quinze ans que je m’ingénie à intégrer la fonction solaire sur les bâtiments de stockage avec toiture métallo-textile ou toiture découvrable : cela est désormais possible. »

Un changement de mentalité

Les premiers prospects sérieux dans l’Hexagone ou en Europe recherchaient surtout à améliorer leur image environnementale via l’installation de panneaux photovoltaïques, la rentabilité à court ou moyen terme n’étant qu’effleurée dans la plupart des cas. L’expert déclare : « Les mentalités ont changé puisque, depuis quelques années, nous constatons que les industriels cherchent de plus en plus l’autoconsommation énergétique. Ils souhaitent produire leur propre énergie pour ne plus dépendre d’un prestataire. En fonction des régions et de la surface équipée, il est désormais possible d’avoir une rentabilité à huit ou dix ans, ce qui est relativement intéressant. »

Denis Oudin, expert en stockage vrac.

Les évolutions réglementaires

Aujourd’hui, la pression légale est de plus en plus forte. Nous pouvons citer l’exemple des hypermarchés, qui seront prochainement contraints d’installer des ombrières photovoltaïques sur leurs parkings ou leurs zones de circulation, ce qui pose de nombreuses problématiques. Dans le secteur industriel, l’obligation de couvrir 30 % de la surface des bâtiments de plus de 1 000 m2 va passer à 40 % en 2026 et à 50 % en 2027. Des encouragements, comme la prime à l’autoconsommation, vont favoriser ce développement. « La réglementation va inévitablement augmenter le nombre de projets photovoltaïques, explique Denis Oudin. Certains industriels cherchent des solutions pour éviter ces obligations, mais les nouvelles solutions techniques donnent de nouveaux horizons. »

Un défi de taille pour les structures métallo-textiles

La structure métallo-textile apporte des avantages indiscutables. Elle est notamment très économique par rapport à des constructions classiques et bénéficie d’une rapidité de conception et de montage inégalée. Denis Oudin avait découvert les premières toiles solaires en 2010 lors du salon FTE World Innovation Summit, organisé à Pittsburg, aux États-Unis. Certes, le concept était intéressant à l’époque, mais les contraintes étaient nombreuses : rendement de 15 % comparé aux panneaux classiques, surcoût prohibitif des toiles et durée de vie très limitée eu égard à la résistance de ces toiles. « Il y a une quinzaine d’années, les solutions existantes étaient trop complexes à mettre en oeuvre et ne fonctionnaient pas correctement, explique l’expert. La grande difficulté résidait dans la fixation des panneaux solaires à la toile, cette dernière étant notamment soumise à des contraintes importantes comme les vibrations. Il fallait percer la toile tout en garantissant une parfaite étanchéité. Le poids de 15 à 20 kg au mètre carré des panneaux nécessitait aussi de recalculer la structure pour l’adapter. Enfin, l’installation des panneaux sur des structures métallo-textiles nécessite des conditions de travail spécifiques pour les monteurs, qui ne peuvent travailler qu’à la nacelle. »

Rails installés sur une toiture métallo-textile pour recevoir les panneaux solaires et équipements annexes.
Les panneaux sont disposés de manière à garantir un éclairage naturel satisfaisant.

Une mise en œuvre désormais possible

Les solutions sont désormais matures : le partenaire Modular, leader européen des grandes structures métallo-textiles avec essentiellement des portées libres de 30 à 80 m pour l’industrie, les ports ou les aéroports, a d’ores et déjà plus de trois années de recul et de multiples applications à son actif. Les arceaux de la structure sont spécifiquement calculés en tenant compte du poids des panneaux et des équipements annexes. Sur la face externe de la toile, des rails sont préalablement installés pour supporter les panneaux tout en garantissant l’étanchéité de la structure. « Plusieurs installations ont déjà été réalisées en Europe, plus particulièrement en Allemagne, en Autriche et en Suisse, explique Denis Oudin. La solution est éprouvée : nous ne sommes plus dans une phase de recherche, mais dans une phase de production et d’installation. »

Tom Blommaert, P.-D.G. de la société éponyme, tenant dans les mains un panneau solaire souple.

Des solutions pour les bâtiments anciens

Dans la plupart des cas, il est possible de faire migrer des bâtiments existants vers une toiture solaire. Cela nécessite cependant une vérification statique préalable et quelques adaptations. La protection incendie sera naturellement renforcée. La forme de la plupart des bâtiments au-dessus de 30 m permet d’installer des panneaux des deux côtés de la toiture, ce qui optimise la rentabilité de l’investissement. Pour les petites largeurs jusqu’à 25 ou 30 m, la forme en dôme ne permet d’utiliser efficacement qu’un seul côté de la toiture. Pour les projets neufs, l’orientation du bâtiment est naturellement optimisée.

Des panneaux souples pour les toits découvrables

Les toitures découvrables sont très utilisées dans les ports, l’industrie et par les collectivités. Par exemple, plus de 200 collectivités, directions interdépartementales des routes, centres d’entretien départementaux des routes, villes de toute taille, ont été équipés pour couvrir des abris à sel avec ce type de toiture. La société Blommaert, située à Anvers, est sans aucun doute, depuis 1978, le leader mondial de cette spécialité, avec plus de 12 000 systèmes installés. Les panneaux de toiture sont manipulés à l’aide d’un treuil électrique, ce qui nécessite une alimentation qui n’est pas toujours disponible sur des sites excentrés. Les panneaux solaires constituent une solution pertinente. Des panneaux fins et souples peuvent être collés directement sur les panneaux de toiture. « Souplesse et finesse qui n’excluent pas la durabilité, nuance Denis Oudin. Avec un poids de seulement 5,7 kg par panneau et une épaisseur de 2,5 mm, on est loin des premières générations de panneaux. Grâce à leur légèreté, les panneaux peuvent être facilement installés sur des bâtiments existants. Une garantie longue durée d’efficacité est apportée. Après 25 ans d’utilisation, la mesure de performance est encore de 83 % du nominal. » L’énergie qui est générée par les panneaux solaires est stockée dans des batteries à hautes performances qui permettent l’ouverture et la fermeture des toitures, la nuit ou par n’importe quelle météo.

Panneaux solaires souples collés sur les panneaux de toiture.

Travailler avec les bons partenaires

Les bâtiments et les infrastructures sont préparés pour recevoir des toitures solaires, un partenaire national ou régional se chargeant de la mise en oeuvre pratique. « Notre métier est de concevoir et d’installer des bâtiments de stockage, précise l’expert. Nous réalisons les études techniques, les calculs de rentabilité, et nous proposons la mise en relation avec nos partenaires spécialisés en photovoltaïque. Ces derniers se chargent alors de l’installation sur la toiture. Nous travaillons avec des groupes indépendants, présents sur plusieurs grandes régions, qui sont capables d’intervenir sur tout le territoire national. Le client peut également sélectionner le prestataire local de son choix. »

Statu quo en France

L’installation de toitures solaires est désormais possible, ce qui permet de répondre à une nouvelle tendance : l’autoconsommation énergétique. Le marché français reste toutefois frileux, comme l’évoque Denis Oudin : « Les fabricants de systèmes photovoltaïques ne cessent d’innover avec des panneaux plus fins, plus esthétiques, avec des impressions particulières, etc. Nos partenaires Blommaert et Modular intègrent déjà les solutions en Europe, mais le marché français reste timide pour le moment, même si des projets conséquents sont en cours de discussion. Le contexte politique actuel peut aussi freiner les investissements. Cela n’empêche pas de constater un véritable engouement des industriels pour une telle solution d’avenir. »

Abri à sel équipé d’une toiture solaire à Woensdrecht, aux Pays-Bas.
La typologie de panneaux photovoltaïque utilisés permet d’envisager de faire migrer une toiture classique vers une toiture solaire. Ainsi, ce client du port de Neuss, en Allemagne, qui est équipé de quinze bâtiments de stockage à toit découvrable de 15 x 40 m envisage ce type d’évolution.