Contrairement aux poussières organiques qui peuvent être source d’explosion, les poussières minérales ne présentent pas de danger de cet ordre. Néanmoins, certaines de ces poussières présentent un risque pour la santé et un nuisance pour les hommes et leur environnement. Des traitements existent pour éviter les envols de poussières. Il est même possible de les valoriser.
Il n’est pas si loin le temps où l’activité dans les carrières, cimenteries ou parcs de stockage de charbon généraient des envols de poussières qui se déposaient à plusieurs centaines de mètres, voire plusieurs kilomètres du site d’extraction ou de stockage. Une véritable gêne, pour les exploitants tout d’abord, condamnés à inhaler des poussières parfois dangereuses pour leur santé mais également pour les riverains qui devaient supporter cette nuisance. La raison est toute simple, constructeurs et exploitants privilégiaient avant tout l’efficacité des hommes et des machines, les poussières étaient juste un mal nécessaire. Chaque transvasement, chaque transport, chaque broyage, chaque criblage était source de poussière. Tant pis. C’était la rançon à payer pour obtenir le produit fini désiré. Les effets néfastes sur la santé, la prise de conscience environnementale, la nécessité de tenir compte de l’avis des riverains, les effets positifs en termes de productivité, de maintenance des matériels et surtout la réglementation ont poussé les cimentiers, exploitants de carrières ou de centrales thermiques à chercher, avec les constructeurs de matériels des solutions. Et ils en ont trouvé. Eurovia, par exemple, qui travaille depuis des années sur le sujet, avec des résultats intéressants. « Auparavant sur les postes secondaires et tertiaires, les employés travaillaient dans plusieurs centimètres de poussières » se souvient Jean-Emmanuel Durand directeur matériel de la délégation Centre-Ouest du groupe « tous les investissements réalisées sur le confinement des machines, les systèmes d’arrosage, systèmes d’aspiration modulaire, tubes anti-poussières installés sur les sur les convoyeurs de mise en stock au sol ont permis d’assainir considérablement tous ces postes de concassage, criblage et autres ».
La silice, particulièrement néfaste pour la santé
Sans remonter jusqu’à l’époque du « Germinal » de Zola, nous avons tous entendus parler de ces « gueules noires » qui, après avoir passé des années à travailler dans les mines de charbon, mouraient à cause de la silicose, une maladie qui est responsable de la mort de plus de 40 000 mineurs entre l’après guerre et la fermeture des mines. D’autres maladies moins graves telles que la talcose ou la kaolinicose sont également la conséquence d’inhalation prolongée de poussières en carrières. Il a fallu attendre une époque récente, 1954, pour qu’un décret rende la visite médicale du personnel de carrière obligatoire, puis encore 40 années pour que soit rédigé le RGIE (Règlement général des industries extractives) qui donne des indications précises sur les précautions à prendre pour protéger le personnel. à compter de cette période, le décret du 2 septembre 1994, va s’appliquer au personnel des sites générateurs de poussières minérales, mais aussi aux intervenants extérieurs qui seront amenés à séjourner pour un certain temps sur le site.
Ce décret va notamment permettre aux exploitants de mesurer le taux d’empoussiérement sur différentes zones de travail, tandis que le médecin du travail va définir l’aptitude de chaque salarié à travailler dans ces zones empoussiérées. Le Code du Travail, quant à lui, ne s’embarrasse pas de toutes ces considérations et définit un seuil de 0,1 mg de poussière par m3 d’air. Il était temps et nécessaire d’agir, puisque les mesures prises à proximité d’un crible sans protection particulière donnent des valeurs allant de 0,25 à 15 mg/m3. Eurovia qui exploite en basse-normandie plusieurs sites qui produisent chacun de 500 000 à 700 000 tonnes de produits finis a pris ce problème à bras le corps en investissant de 500 000 à 700 000 euros par site rien que pour le dépoussiérage. Un investissement lourd mais incontournable dans une région où la silice est très présente : « Aujourd’hui, la question ne se pose plus » tranche Jean-Emmanuel Durand « le dépoussiérage est pris en compte dans tous nos investissements. Nous estimons qu’il représente 10 à 15 centimes d’euros par tonne produite en coût d’investissement. Sans tenir compte dans ce calcul des bénéfices que l’on retire sur la main-d’oeuvre nécessaire pour le nettoyage, ou la durée de vie des équipements »
Les mesures à prendre
« Dès qu’il y a une carrière de roches meubles de type alluvionnaires ou de roches dures de type massives, contenant plus de 1 % de silice, il est indispensable de faire un abattage de poussières correct, car la silice est dangereuse pour la santé » explique Henri Belledent directeur ingénierie et maintenance chez Cemex France « par contre dès lors qu’il s’agit d’une carrière de roches massives de type calcaire avec 0 % de silice, l’abattage des poussières ou l’utilisation d’un système de dépoussiérage n’est pas obligatoire. Cette obligation ne concerne que la santé. Par contre, de plus en plus, pour une question d’environnement et de proximité nous faisons, même dans les carrières de roches massives sans silice, un abattage de poussières, principalement l’été. Donc toutes les carrières se doivent d’avoir un arrosage de pistes correct ». Ensuite, chaque exploitant a sa propre conviction sur la technique à appliquer. Certains sont persuadés que l’abattage des poussières ne s’effectue que par voie sèche, par aspiration. D’autres au contraire, préconisent l’abattage des poussières par voie humide soit par aspersion d’eau avec ou sans additif, soit par atomisation ou micronisation. Il s’agit alors d’un mélange eau/air comprimé qui permet de réduire la taille des gouttelettes. Ensuite, certaines techniques ne conviennent que pour des applications spécifiques. Abattre les poussières sur les stocks ne peut être réalisé que par voie humide, car sur des volumes importants, les envols de poussières sont la conséquence de l’action conjuguée de la sécheresse des poussières et du vent qui les transporte. En revanche, à l’intérieur de l’installation deux techniques de suppression des poussières sont possibles : voie humide ou voie sèche. Si la voie humide est efficace, elle présente tout de même certains risques : « elle peut accentuer le caractère abrasif de certains produits comme les agrégats avec des conséquences sur les coûts d’usure » prévient Eric Maricot de Metso Minerals France. En voie sèche ce sera par aspiration qu’elle soit centralisée avec un seul dépoussiéreur de grande capacité ou par aspiration modulaire, en venant placer un aspirateur à manches, directement sur chaque appareil qui doit être dépoussiéré. Sachant que bien souvent c’est la proximité des appareils entre eux qui permet d’opter pour une aspiration centralisée.
Pas d’aspiration efficace sans confinement
à partir du moment où le matériaux est en mouvement, chaque fois qu’il sera remué ou transvasé (passage dans le concasseur ou le crible, jetée d’une bande transporteuse sur une autre ou dans une trémie, chargement d’un camion) il générera des poussières. C’est au plus près de la source de poussière qu’il faut la capter, c’est à cet endroit que c’est le plus facile et le plus efficace car c’est là que la densité de poussières par mètre cube d’air est la plus forte. Le confinement (ensemble des dispositions prises pour empêcher la dispersion des poussières) est donc primordial. Réaliser un dépoussiérage efficace que ce soit sur une installation ancienne ou sur du matériel neuf dépendra essentiellement du confinement. « Dans le procédé de captage des poussières, le confinement compte pour 80 % du résultat » estime Jean-Emmanuel Durand. « Sans un bon confinement, impossible d’obtenir un dépoussiérage efficace ». Suivant la configuration du matériel, ce confinement pourra être réalisé à l’aide de jupes en caoutchouc installées sur les cribleurs, de systèmes d’auges, de capotages ajoutés. Les matériels les plus récents bénéficient de systèmes de confinement prévus dès leur conception, donc très efficaces.
Ne pas oublier les pistes
Dans une carrière, le traitement des matériaux proprement dit est source de poussières, dès la première phase, lors de la foration, puis de l’abattage et du « marinage » (transport du front de taille jusqu’à l’installation de traitement). Lors de ce premier roulage des dumpers sur la piste qui sépare le front de taille du lieu de traitement, les occasions de lever de la poussière sont nombreuse que ce soit lors du roulage ou lorsque les dumpers déversent leurs matériaux dans un primaire. L’arrosage permet d’éviter les poussières provoquées par le roulage des engins en interne (chargeurs, dumpers...). Mais il y a aussi la poussière provoquée par les véhicules extérieurs qui viennent dans les carrières pour charger, les produits finis, Pour limiter au maximum les envols de poussières dans cette zone qui englobe la réception, le pesage et le chargement, les exploitants essayent au maximum de faire rouler ces camions sur des pistes enrobées ou traitées pour éviter de soulever les poussières. Quant au reste de la carrière, le plus important, en été, est d’effectuer un arrosage des pistes, soit avec un système automatisé de sprinklers installés le long des pistes, soit en utilisant des arroseuses, camions citernes munis de pompes haute pression qui sillonnent toutes les pistes des carrières pour maintenir l’humidité nécessaire. Comme le confirme Henri Belledent « dans certaines carrières du sud de la France, par exemple, cet arrosage peut s’effectuer pendant tout l’après midi. Tout dépend du nombre de kilomètres de pistes qui nécessitent un arrosage. Un camion arroseur est engin qui fait partie de la panoplie des matériels que l’on retrouve sur toutes les carrières de roches massives ». Les sprinklers sont généralement utilisés sur la partie stockage et transformation tandis que les camions arroseurs prennent en charge les pistes qui vont du front de taille au centre de traitement. La raison tient au fait que ces pistent changent de physionomie au fur et à mesure de l’exploitation du front de taille.
Le capotage : bien utile dans certaines conditions
La législation impose aux carrières de poser des CIP 10 (Capteurs Individuels de Poussières) en périphérie des carrières pour contrôler l’envol des poussières à l’extérieur du site. Ces données sont communiquées aux Drire pour valider la conformité de la carrière avec la législation en vigueur. Parmi les précautions à prendre, le capotage des convoyeurs, est une action préventive efficace, surtout au niveau des jetées. Ensuite son utilisation se justifie au cas par cas en fonction de la proximité de routes ou de bâtiments et surtout de la nature du produit transporté. Chez Cemex on estime que le capotage, pour du matériaux en 0/2 ou 0/4 mm, est nécessaire, car les fines auront tendance à s’envoler au premier coup de vent. Par contre ce capotage n’est plus indispensable sur du gravillon à partir de 10 mm.
Des évolutions toujours possibles
Pour Eric Belledent : « les évolutions arrivent avec les bonnes pratiques et des progrès sont encore à venir, ne serait-ce qu’en abattage. Aujourd’hui, certains constructeurs proposent des solutions intéressantes avec, par exemple, des dépoussiéreurs de type électrostatique ou par cyclonage comme alternative aux filtres à manches ». Mais si des progrès restent à faire, les résultats sont déjà convaincants « Nous arrivons à obtenir des taux d’empoussièrement de l’ordre de 1 mg de poussières par m3 d’air, dans les bâtiments, ce qui est une très belle progression » reconnaît Jean-Emmanuel Durand qui estime que des progrès restent à faire concernant l’intervention des hommes lors des opérations de maintenance par exemple : « Lorsqu’une personne intervient sur du matériel à l’arrêt, il y a toujours beaucoup de poussière, les zones de travail sont exigües et le personnel doit être très protégé. Il reste de grands progrès à faire pour favoriser les conditions de travail lors de ces phases d’entretien ».
Un process étudié pour éviter les poussières
Le dépoussiérage passe aussi par le process de traitement des matériaux. Sur la nouvelle installation de son site de Sorèze dans le Tarn, Cemex a opté pour un dépoussiérage centralisé, tout en étudiant soigneusement le process. Ce dernier a été choisi pour générer le moins de poussières possible. « Lorsque l’on fabrique des matériaux qui entreront dans la composition du béton comme, comme par exemple : du sable 0/4, des gravillons 4/10 et des gravillons 10/20, le principe habituel consiste à amener sur le premier crible des matériaux constitués d’éléments fins, moyens et gros. Le premier crible aura à charge d’enlever les éléments les plus gros, tandis que les moyens et les fins iront sur le deuxième crible pour sélectionner les éléments de taille moyenne et enfin, les éléments fins passent sur le dernier crible pour être calibrés. Quand on sait que les matériaux susceptibles d’engendrer des émissions de poussières sont les plus fins et qu’ils sont transportés de crible en crible, ils génèrent de la poussière sur toute la ligne » résume Henri Belledent. La nouvelle approche sur le site de Sorèze a donc consisté à sortir les éléments fins dès le premier crible pour éviter de transporter cette poussière de machine en machine. « C’est à dire » reprend Henri Belledent « que sur la première machine vont sortir les gros et les fins, sur les deuxième, les moyens et les fins et sur le troisième que les fins. Donc les éléments fins vont être sortis dès que possible pour éviter les poussières dans toutes les jetées de convoyeurs à bande et dans tous les cribles ». Ici, le but est de sortir le plus rapidement possible du process les fillers ou les sables qui génèrent beaucoup de poussières.
Est-il possible de valoriser poussières et fillers ?
Toutes les poussières au-dessous de 63 microns sont appelées des fillers. Les systèmes d’aspiration de type modulaire ou d’aspersion réinjectent les poussières dans les matériaux, c’est-à-dire qu’un système d’aspiration modulaire aspire la poussière ambiante et un séquenceur pneumatique renvoie les poussières aspirées sur les matériaux. « L’atmosphère est dépoussiérée » reconnaît Henri Belledent « mais les fillers sont réinjectés dans les matériaux. Il n’y a pas de poussière au poste de travail mais à la prochaine jetée de convoyeur à bande, il y en aura à nouveau. Même chose avec le dépoussièrement par voie humide, puisque les poussières sont captées et collées sur les matériaux. ». Par contre avec un dépoussiérage centralisé, les poussières sont récupérées et il existe plusieurs solutions pour les valoriser ou les rejeter. En effet, elles peuvent : soit rejoindre les fosses à remblayer sans valorisation; soit être réinjectées dans certains produits, comme pour la fabrication de graves routières. D’autres voies de valorisation existent. Dans certaines régions, ces fillers sont vendus pour être mélangés à d’autres produits afin de fabriquer des engrais, notamment lorsqu’il s’agit de calcaire. S’ils sont suffisamment calibrés, ils peuvent aussi être vendus tels quels à des centrales d’enrobés. Ces centrales cherchent à avoir des sables avec des taux de fillers constants. Pour cela elles testent leurs sables et quand il manque des fillers, elles en réinjectent. Dans certaines régions il existe un marché pour ces fillers. Notamment dans les régions du sud de la France où il y a beaucoup plus de carrières de roches massives calcaires que de roches alluvionnaires. « L’avenir ira vers un accroissement des fillers sur le marché » estime Henri Belledent « car le marché des granulats est en train de faire une transition de l’alluvionnaire vers le calcaire. Auparavant il y avait beaucoup plus de sablières et de gravières que de roches massives, maintenant c’est le contraire. Et dans l’avenir, il y aura moins d’autorisations pour de l’alluvionnaire donc le marché des fillers deviendra de plus en plus important. L’objectif consistera alors à trouver des marchés nouveaux pour ces produits fins ».
Gaël d’Argentré
Les différentes techniques de dépoussiérage
Les carriers, cimentiers et miniers, sont arrivés à d’excellents résultats dans leur combat sanitaire contre l’empoussiérage. Le déploiement d’équipements visant à traiter les émissions de poussières minérales en est, pour grande partie, l’explication. Plusieurs méthodes sont proposées par les différents fournisseurs, entrons dans les détails techniques…
De manière générale, les poussières minérales étant neutres et n’imposant pas d’installations anti-explosion, les normes ATEX ne s’appliquent pas dans les carrières au niveau des équipements de production, excepté dans certaines mines où l’on extrait des produits explosifs ou inflammables tels que le souffre ou le charbon.
Abattre les poussières en les rendant plus lourdes
Dans la lutte contre l’empoussiérage, il existe un concept basé sur l’abattage de poussière par une pulvérisation ou brumisation d’eau. Le rôle des gouttelettes est d’alourdir les poussières minérales en se collant à elles afin de les faire chuter, empêchant ainsi leur dispersion dans l’atmosphère. La société VAL Id commercialise le système Naltec qui ne contient aucun additif. En n’utilisant que de l’eau, le système garantie un respect total de l’environnement.
Naltec est disponible sous différentes configurations : rampes de pulvérisation, canon à brouillard, carter pour s’adapter sur les capotages, etc. Il est modulable, et s’adapte sur de petites installations ou de grands sites. Néanmoins, l’eau seule n’est pas par nature mouillante et lors d’un contact poussière/gouttelette, seules quelques molécules restent fixées sur la poussière. La poussière n’a quasiment pas changé d’état et poursuit sa course, il s’agit du phénomène d’opposition des particules. De plus, les effets de vitesse sur trajectoire sont aussi des éléments préjudiciables au contact poussière/ gouttelette car si la vitesse de la gouttelette est trop grande, il s’ensuit au niveau microscopique des effets de compression d’air entre les éléments empêchant leur contact. Afin de pulvériser un produit plus efficace que de l’eau pure, la société RAM Environnement a créé le procédé RAM (Réduction de l’Action Moléculaire). Celui-ci est basé sur l’association d’une très faible quantité d’eau à un agent réducteur de tension superficielle dénommé RAM NC525, un produit non ionique et biodégradable dont l’emploi respecte la législation en vigueur. La qualité de l’agent tensioactif est associée à un système original de pilotage et de contrôle. Celui-ci garantit ainsi une concentration constante, préservant le matériau traité, qui ne reçoit en moyenne à la tonne que 0,3 à 0,5 % d’eau, soit moins de 2 ml d’agent tensioactif. à noter que l’utilisateur peut profiter de la pulvérisation pour ajouter des produits destinés au traitement des nuisances olfactives. « 75 à 80 % des poussières sont traitées par voie humide. Certains fournisseurs garantissent des taux proches de 95 % sur le papier, mais cela me paraît exagéré et intenable », détaille Fabrice Deniel, chargé d’affaires chez RAM Environnement. Sur une mine ou une carrière, les brumisateurs et pulvérisateurs se positionnent quasiment partout : au poste primaire où les engins (dumpers ou pelles) déchargent dans la trémie de recette, en amont et en aval des broyeurs, au niveau des mises au stock extérieur, et aux postes de chargements, qu’ils soient routiers, ferroviaires ou portuaires. En revanche, la voie humide est déconseillée au niveau des cribles à cause du colmatage. « Importée des états-Unis il y a plus de quarante ans, la pulvérisation avec agent mouillant est une technique que nous n’avons pas inventée, mais que nous avons perfectionnée grâce à l’emploi de techniques modernes de dosage d’additifs. Cependant, parce que le principe général de nos équipements est semblable à celui des systèmes d’irrigation, certains exploitants s’imaginent qu’ils peuvent concevoir eux-mêmes leur système de pulvérisation. En général, ils se rendent vite compte qu’il est plus intéressant pour eux de s’équiper auprès d’un expert, lequel tient ses engagements », raconte Fabrice Deniel. Le seul inconvénient réside dans le fait que cette technique nécessite une arrivée d’eau, à moins que l’utilisateur n’utilise des réservoirs d’eau ou ne crée un lac artificiel à proximité de son exploitation.
Abattage des poussières par aspiration
« Parfois l’emploi de la voie humide est inefficace », reconnaît Fabrice Deniel. En effet, l’usage de l’eau peut alourdir les produits extraits, colmater au niveau des cribles, produire de la boue et détériorer le fonctionnement des rouleaux. De plus, « un système de pulvérisation ne peut retenir le souffle important d’un puissant broyeur qui va traverser la barrière d’eau sans que les particules ne soient retenues », détaille Roger Netzer, responsable du service projets de KH Mineral. N’étant pas toujours favorables à cette technique humidifiante, les carriers se rabattent sur des équipements d’aspiration de poussières par voie sèche. Néanmoins, l’aspiration par voie sèche et l’abattage par voie humide restent des techniques complémentaires et non concurrentes. En réalité la technique d’aspiration par voie sèche se décompose en deux étapes : l’aspiration proprement dite, puis la filtration par voie sèche, c’est-à-dire à l’aide de filtres à manches. Ainsi, avant de dépoussiérer, il faut dans un premier temps capoter l’ensemble des sources émettrices de poussières afin d’éviter la propagation de la poussière dans l’environnement. Le capotage consiste à confiner une zone avec la meilleure étanchéité possible pour minimiser les volumes à aspirer. « Des solutions astucieuses de capotage, des fermetures de surface, des éléments mobiles ou souples, etc., vont nous permettre de limiter les surfaces où la poussière va s’échapper », précise Jacques Grappin, directeur de la communication et secrétaire général de Delta Neu. Les capots enveloppent toutes les zones où il y a automatiquement un dégagement de poussière : les tapis, les chutes de bandes transporteuses (en cas de changement de direction d’un tapis), les broyeurs, les tamiseurs, les cribles, ou toute autre machine liée au process sur une carrière. Ensuite, il faut déterminer les points d’aspiration suivant l’installation montée dans la carrière, avant de mettre en dépression et filtrer.
Deux solutions s’offrent à l’exploitant : « soit celui-ci place localement un dépoussiéreur sur chaque point d’émission, soit il positionne plusieurs capots répartis dans la carrière sur chaque point d’émission, tous reliés à un dépoussiéreur centralisé par un réseau de tuyauteries. Rien ne l’interdit également d’opter pour une combinaison de ces deux solutions », explique Roger Netzer. La poussière retenue sur la surface du média filtrant forme un gâteau. « Le filtre est décolmaté grâce à une injection à contre-courant d’air comprimée qui va permettre de déformer le média et de faire tomber ce gâteau de poussière », explique Christophe Benjamin, directeur commercial France de Delta Neu, « ce principe est valable quelle que soit la taille des filtres employés ». Concernant les volumes d’air traités par la voie sèche, il n’y pas de limite théorique selon les différents équipementiers. La fourchette va de quelques milliers de m³/h à plusieurs centaines de milliers. La véritable limite est le compromis technico- économique qui permettra de trouver des solutions qui mettent en jeu des débits raisonnables.
Associer une colonne de défillérisation aux dépoussiéreurs
« Le traitement du gravier passe par un concassage qui génère à peu près 30 % de sable. Aujourd’hui ce sable est stocké, comme si il était un déchet. Or nous avons inventé un appareil qui permet de valoriser cette poussière par un système de tri aéraulique : la colonne de défillérisation », lance Christophe Benjamin. Selon les responsables de l’entreprise Delta Neu, « défillériser » signifie retirer les fillers du sable. Issus du broyage, les fillers sont les granulométries les plus fines qui polluent la qualité des graviers. Mais, une fois triées, elles peuvent devenir un additif dans les matériaux de construction, en particulier les bétons hydrauliques. Avec la valorisation des poussières, Delta Neu innove en allant plus loin dans le traitement des poussières. « Ce marché est réellement porteur pour nous car les gisements de sables naturels alluvionnaires se raréfient », explique Christophe Benjamin. La colonne de défillérisation est fabriquée en tôlerie de forte épaisseur, dans cette colonne, le flux de sable descendant rencontre un flux d’air ascendant (15 000 à 30 000 m³/h selon le tonnage en entrée) qui entraîne les fillers. Cette solution permet ,par exemple, avec une entrée de 20 à 70 t/h de sable 0/2 ou 0/4 contenant de 15 à 20% de fillers, d’obtenir un gain de 5 à 8 % de fillers en sortie.
Dépoussiérage électrostatique
RAM Environnement a également lancé une innovation de dépoussiérage par procédé électrostatique. Baptisée Volta-RAM, cette solution est basée sur la technologie des électrofiltres. L’électrofiltre est un dépoussiéreur qui utilise les forces électriques pour séparer les particules. La charge des particules résulte d’un phénomène appelé « effet couronne » qui apparaît lorsque l’on applique une différence de potentiel entre deux conducteurs. Les électrons libres ainsi émis par cet effet couronne acquièrent une grande vitesse et par choc, ils ionisent les molécules de poussières. Ils produisent ainsi des ions négatifs qui se déplacent rapidement vers les électrodes réceptrices sous l’influence du champ électrique, de fort voltage. Au cours de leur déplacement, ces ions se fixent sur les particules en suspension dans les poussières. Celles-ci acquièrent une charge négative et se déposent sur les électrodes réceptrices. La collecte des poussières est réalisée par marteaux frappeurs pneumatiques sur les cadres émissifs, sur les électrodes réceptrices ainsi que sur le système de répartition. Le frappage est géré cycliquement indépendamment par automate sur chaque module. Ce système s’implante en sortie de n’importe quelle machine : broyeurs de tous types, crible, scalpeur, transfert de bandes etc. Il peut être déporté en dehors de la bande du tapis transporteur, afin d’améliorer les possibilités d’implantation, et permettre de traiter plusieurs points avec un seul appareil Volta-RAM. Peu gourmand en énergie électrique (moins de 3kW en 220 V), Volta-RAM se situe à mi-chemin entre la pulvérisation et l’aspiration. Selon le constructeur, l’appareil est adapté aux pays émergents, où les installations de carrières sont alimentées par des groupes de co-générations limités en puissance, ou sur des sites ne disposant que très peu ou pas du tout d’eau de pluie ou de forage.
Aspiration centralisée haute dépression
L’aspiration centralisée Haute dépression (ACHD) est un complément au dépoussiérage de gros. En effet, une installation de dépoussiérage seule, aussi efficace soit-elle, dans un contexte d’envols des poussières permanent (camions, déplacements etc.), n’est pas réellement suffisante. « Si l’exploitant veut arriver à un résultat d’excellente propreté en vue d’éviter notamment les incrustations de poussières dans les mécaniques, il va devoir employer une forte puissance d’aspiration afin de nettoyer les machines, les sols et les charpentes », explique Jacques Grappin. L’ACHD consiste, en quelque sorte, à « faire le ménage » en positionnant des bouches d’aspiration au niveau des zones à nettoyer. Les tuyauteries de ce réseau d’aspiration fixe sont raccordées à un filtre et à un groupe Haute dépression.
Des locaux électriques propres grâce à la ventilation
Sur les sites d’exploitation des carrières il y a toujours des locaux électriques destinés à alimenter tous les équipements industriels (broyeurs, concasseurs,…). Or ces salles « baignent » aussi dans un contexte très poussiéreux, ce qui oblige à y maintenir une certaine propreté. Pour se faire, la société Delta Neu assure une mise en surpression des locaux électriques par des systèmes de ventilation, lesquelles peuvent être rafraîchis à l’aide d’une climatisation naturelle par évaporation d’eau. En d’autres termes, « nous allons injecter de l’air filtré à l’intérieur de ces locaux de manière à assurer leur propreté, et, du fait de la surpression, à empêcher les entrées de poussières parasites qui viendraient nuire au fonctionnement électrique », conclut Jacques Grappin.
Olivier ROUSSARD